12 principes pour une parentalité assumée

12 principes pour une parentalité assumée. Une tentative de définition qui prend en compte les enjeux du parent d’aujourd’hui pour aider à se situer dans son propre parcours parental.
Loin de vouloir proposer un modèle idéal de parent donneur de leçon, j’espère que cette réflexion servira à stimuler le plaisir d’être un parent assumé.
A la question « Qu’est ce qu’un bon parent ? », je réponds: « C’est une question délicate qui n’a pas de réponses tant il y a de parents avec une approche unique. Je dirais que le meilleur parent que votre enfant à besoin d’avoir, c’est vous. » Cela dit, lorsque dans les années 50 Winnicott D. défendait l’idée d’une mère suffisamment bonne, il sous-entendait un modèle parental qui ne soit ni trop faible ni trop excessif pour que l’enfant puisse grandir au mieux. Entre les deux en somme.
Entre-temps, en 1989, nos nations ont adoptés les principes fondamentaux Des Droits de l’Enfant (CIDE)1, établissant tout être humain âgé de moins de 18 ans, a disposer du droit d’être protégé, nourri, soigné, éduqué, de s’exprimer, d’avoir des loisirs, etc. Un texte s’inscrivant dans une volonté de nos sociétés d’accorder plus d’importance au développement de l’enfant et donc de s’interroger sur les pratiques éducatives les plus adaptées.
Si ces initiatives et ces mesures sont apparu, c’est bien parce qu’il existe la possibilité d’élever son enfant d’une façon qui soit inapproprié ou en tout cas moins significative. Pour aller dans le sens de ces considérations, voici quelques pistes de réflexion. Elles font appel à la fois au bon sens, à ma propre expérience et aux résultats de la recherche dans ce domaine.
1. Savoir ce que vous voulez transmettre
Avoir une idée de ce que l’on veut transmettre vous aide à savoir à quoi vont ressembler vos principes et vos exigences, le type d’expérience que vous souhaiterez proposer à vos enfants, le modèle que vous pourriez leur renvoyer, les règles de vie en famille, etc. Il semble nécessaire d’être assez au clair avec ses valeurs, celles qui sont capitales, celles qui le sont moins et pourquoi elles le sont (car vos enfants vous questionneront sur le sens de tout cela, soyez en sûrs).
2. Se servir de sa propre enfance
Repenser à sa propre enfance. Pourquoi ? Pour y chercher ce que vous voulez reproduire ou non de votre propre éducation ; pour comprendre pourquoi vous reproduisez tel façon d’élever votre enfant alors que cela semble nuire à la relation ; ou pour vous inspirer d’une personne d’influence (un enseignant par ex.). Notez ce que vous voulez changer et comment vous pourriez le faire différemment.
3. Pas de parent parfait
La perfection n’est pas de ce monde, faîtes au mieux. Vouloir maîtriser, contrôler, paraître bien devant les autres n’apporte que culpabilité, colère, sentiment d’échec, amertume, etc. Etre indulgent envers soi-même permet d’admettre plus facilement ses erreurs et ses points faibles. Cela aide à reconnaître lorsque l’on est épuisé, ou énervé ou bien que l’on voulait trop en faire. Cela aide notamment à présenter ses excuses à son conjoint et à son enfant plus facilement. A ce propos, votre enfant est tout autant imparfait et aura tout autant besoin de votre indulgence le moment venu.
Enfin, un parent trop parfait rendrait fou un enfant d’une certaine façon. A mon sens, ce dernier a plutôt besoin de pouvoir s’attaquer à vos incohérences pour pouvoir se construire. En effet, cela lui permet de développer un dialogue entre vous et son monde intérieur et ainsi élaborer les compétences nécessaires pour vivre dans ce monde.
4. Un modèle imparfait
Maintenant que vous vous autorisez à être imparfait, n’oubliez pas que vous êtes un modèle ! C’est tout l’enjeu de montrer l’exemple sans prétention. En effet, les enfants apprennent en observant leurs parents. Ainsi, ils imiteront vos comportements et les reproduiront avec leurs pairs et en société. S’il n’y a pas de gros mots à la maison (ou moins que chez les autres) il n’y en aura pas ailleurs. Si les contrariétés et les disputes sont réglées avec les adultes dans le dialogue et le respect il n’y aura pas d’usage d’insultes et de coups pour les régler ailleurs. Vous voulez qu’ils sachent partager ? Montrez leur que vous en êtes capable dans la vie quotidienne. Vous voulez qu’ils développent la maîtrise de soi ? Démontrez votre self-control et votre sens de la répartie lorsque vous êtes confronté à un chauffard sur la route par ex. Dire merci est un signe de respect envers les adultes à vos yeux ? Illustrez-le en étant vous-même reconnaissant envers les enfants comme les adultes, etc.
5. Deux parents, différents
Sans rentrer dans les détails des différentes compositions familiales possible, l’enfant à de grandes chances de bénéficier d’approches parentales différentes. Si l’on considère que chacun des adultes possède une éducation, des valeurs, des conceptions philosophiques, religieuses, politiques etc. qui leur sont propres, il y a de fortes chances pour que ces différentes conceptions s’invitent subtilement dans le quotidien. L’enfant percevra tout cela. C’est à dire non seulement les différences mais aussi les nuances, les oppositions, les contradictions, les incohérences (ce qui fait que nous sommes humains). Cela est très souvent source de conflit dans le couple.Tout d’abord, dédramatisons. Votre enfant n’est pas condamné à devenir schizophrène ou asocial. Si la communication est possible, il devrait s’en sortir par le biais de négociations, de discussions et de remise en questions qu’il fera de lui-même. Il fera le tri, comme vous l’avez fait plus jeune, pour retenir ce qui lui conviendra. En revanche, lorsque vous vous retrouvez en porte à faux devant votre enfant parce qu’une règle donné par un des adultes s’oppose à celle que vous tenter de mettre en place il vaut mieux rester unis et solidaire (faire front) quitte à en reparler entre adultes, entre-vous à un autre moment (pas devant l’enfant).
6. Jouez, jouez, jouez
Le mode d’apprentissage par excellence de l’enfant est le jeu (il n’a jamais assez de temps pour jouer dira t-il). Par le jeu (mise en scènes, de société, de poupées, de construction, d’équipe, etc.), l’enfant élabore son rapport au monde. Il y développe sa personnalité, les connaissances nécessaires pour entrer en relation avec les autres et établir des transactions, développer sa logique, son raisonnement, intègre les codes culturels et relationnels, etc. Jouer avec votre enfant dès son plus jeune âge et par la suite vous permet de prendre part à son éveil, à son développement et à renforcer ses compétences. Jouer avec lui c’est vous émerveiller de ses prouesses, d’une attitude étonnante ou singulière, de vous laisser aller à craquer (car dans le fond il est là pour vous faire craquer, non?) et de développer une complicité, un lien. Un lien puissant qui vous donne toute légitimité pour lui demander quelque chose ou pour lui enseigner quelque chose. Pour ceux qui penses que la vie c’est une affaire sérieuse il est tout à fait possible de conserver le caractère ludique des choses lorsque votre enfant vous aide avec ses propres outils ou accessoires customisés en mode enfant (jardinage, bricolage, etc.). Laver la voiture en famille peut tout à fait être une activité ludique par ex. Passer du temps avec votre enfant est une voie fondamentale pour lui signifier votre amour. Le temps passé ensemble a mille fois plus de valeur qu’offrir le dernier smartphone, des repas au MacFlo ou des jeux vidéos (quand bien même nos enfants nous supplieraient de les leur offrir ce n’est pas ce dont ils ont besoin en priorité).
7. Etre intentionnel
Accueillir un enfant nous amène à être intentionnel. Il n’est pas encore autonome pour s’assumer seul, prendre soin de lui-même ou faire des choix raisonnable. Etre parent induit donc de prendre jour après jour des décisions dans son intérêt. Décisions que vous prendrez selon ce qui vous semble juste. En rapport avec sa santé, son instruction, l’apprentissage des limites et des codes sociaux, etc., tout ce qui lui permettra d’acquérir son autonomie. Ainsi, le parent est amené à réfléchir, à construire et à mettre en œuvre un modèle éducatif pour atteindre ces objectifs. Il s’agit bien d’une attitude active et non pas passive où on attendrait que quelque chose se produise. Par conséquent, être attentif à son développement vous conduira:
- à chercher à comprendre sa personnalité et à en tenir compte en adaptant vos exigences ou en étant attentif aux contexte qui la mettrait en valeur
- à l’initier aux règles de vie en société
- à comprendre ses besoins, à l’aider à les exprimer et à les gérer
- à accepter la frustration par les limites et l’acceptation de la réalité (on a pas tout ce qu’on veut, ma liberté s’arrête là où commence celle des autres, etc.)
- à aiguiser sa curiosité en partageant vos propres centres d’intérêt ou en l’emmenant découvrir des lieux que vous maîtrisez moins (musées, villages de caractère, châteaux, expo, bibliothèque, etc.). Pour moi la nature reste un lieu d’exploration infini.
- à trouver et développer ses dons et ses aspirations par le biais d’activités diverses (sport, bricolage, projets civiques, relations sociales, cuisine, jeux, etc.)
- à comprendre le monde des adultes en parlant de votre parcours, l’histoire de la famille, les événements difficiles, le rôle de la politique, la gestion des finances familiales, etc.
8. Etre disponible
Votre foyer doit pouvoir être un havre de paix. Un lieu secure où l’enfant peut se poser et se sentir en confiance pour venir vous confier ses tracas (pas de va et vient incessants de gens de passage, des disputes à répétition dans le couple, un parent sans cesse occupé par mille projets qui l’entraîne au téléphone, sur la route ou a rester collé à son ordinateur). Etre disponible et à l’écoute cela se traduit soit de manière intentionnel où vous lui posez des questions orientées sur sa journée, ses besoins du moment par rapport à sa chambre, un prochain voyage ou la perspective d’une soirée en tête à tête, etc. Cela peut venir de lui au moment du coucher, à table ou en venant vous déranger dans votre activité parce qu’il sait que vous saurez vous interrompre pour l’accueillir et l’écouter.
9. Dire je t’aime
Tout comme nous pouvons avoir la capacité de leur dire « va prendre ton bain, range tes chaussures, va faire tes devoirs » une dizaine de fois par jour, il est tout à fait possible et même recommandé de dire aussi à son enfant « je t’aime » (autant de fois que vous le voulez). S’il répond « je te crois pas », ça peut être intéressant de creuser avec lui pour comprendre ce qu’il trouve d’inadapté entre nos paroles et peut-être certains actes qu’il détecterait comme incohérent. S’il ne l’apprend pas maintenant pourquoi le ferait-il plus tard ?
10.Un amour inconditionnel
Nous sommes très souvent tenté nous adultes de conditionner notre amour à leur obéissance. Pas de bonnes notes : je ne t’aime plus. Tu ne m’a pas fait de bisou : je ne t’aime plus. Tu ne m’a pas apporté ce que je t’ai demandé : je ne t’aime plus. Tu n’es pas venu alors que je t’ai appelé 5 fois : je ne t’aime plus. Tu as ramené de la drogue à la maison : ne mets plus jamais les pieds ici, etc. L’individu pour grandir de manière équilibré à davantage besoin de se sentir aimé inconditionnellement que selon sa conformité aux règle de l’adulte, du groupe ou de la famille. Nous désirons tous être aimé comme nous sommes, peu importe si nous avons fait des erreurs, avons été distraits, si notre personnalité ne convient pas, etc. Tout l’art consiste à savoir négocier les règles mises en place, clarifier nos attentes et les conséquences comme quelque chose en moins, un bonus retiré, votre mécontentement et de s’y tenir tout en confirmant que nous aimons toujours l’enfant mais n’acceptons pas son comportement (ce qu’il fait). C’est un principe majeur à mon sens.
11.Savoir rire de soi
Savoir rire de soi permet de se décentrer des attentes parent-enfant et de regarder l’adulte que nous sommes en y décelant certaines de nos gaucheries, nos maladresses, nos étourderies, nos excès, notre côté ringard, etc. Cela va de pair avec une bonne estime de soi mais cela s’apprend. Il s’agit d’être à l’aise avec le fait d’être imparfait. Dans ces moments là vous montrez à l’enfant que c’est possible de rire de soi et d’accepter un regard critique objectif sans se vexer, sans réagir forcément par la défensive et l’attaque, ou le repli en s’accablant de honte. En se montrant »critiquable » on autorise également l’enfant à pouvoir exprimer librement certains reproches ou des remarques qu’il ne s’autoriserait pas dans d’autre contexte par peur de nos représailles. Ces instants de »vulnérabilité » peuvent être très instructifs sur la bonne santé des relations. Je rajouterais aussi de laisser de la place pour des moments de folies dans le quotidien : musique à fond, tout le monde danse, fait sa chorégraphie, on improvise une chanson, on monte sur la table (si elle est solide), fous rire sans raison, etc. (tout ceci n’est qu’à titre indicatif, faîtes ce qui vous correspond). Les enfants adorent ces moments de légèreté dans un quotidien très organisé autour du confort des adultes. Sans compter qu’en couple, s’autoriser à rompre un peu avec le sérieux de nos obligations, cela participe au processus de séduction…
12.Ne pas s’oublier, soi et son couple
Le parent est une personne, qui, avant d’avoir des enfants, a des amis, des besoins, des envies, des projets, des rêves, etc. Bien sûr, tout ceci est chamboulé avec l’arrivée des enfants mais n’oubliez pas d’exister en dehors de vos enfants. Cela s’organise, se réorganise, se priorise. Tout ne peut peut-être pas être fait, il s’agit surtout de déculpabiliser et d’accepter que c’est tout aussi important d’avoir du temps pour vous. Comme je le rappelle régulièrement aux couples, les parents sont avant tout des couples, qui demeurent en tant que tel le point de départ de cette aventure avec son lot de projets à deux, de besoins et d’attentes réciproques. N’oubliez pas de prendre soin de ce couple en fermant parfois la porte de la chambre, en mettant gentiment mais fermement à distance toutes les sollicitations des enfants, en se réservant des soirées en tête à tête de temps en temps et tout un tas d’autres moments où les conjoints peuvent développer leur complicité.
Sébastien Cottet.
1 Convention Internationale des Droits de l’Enfant. Adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, dans le but de reconnaître et de protéger les droits des enfants.